Marché d'Intérêt National : 60 ans et toujours bonne MIN

Par Julie Fontana

publié le 1 sept. 2023

Article

Economie

Jean-Sébastien Faure

Appelé aussi Halle centrale des métiers de bouche ou plus familièrement «marché de gros», le Marché d’Intérêt National (MIN) a 60 ans cette année. Peu visité par le grand public de par sa vocation professionnelle, c’est pourtant l’endroit clé de rencontre entre l’offre et la demande des produits alimentaires frais. Son anniversaire est l’occasion de revenir sur son histoire et dévoiler son programme festif. Entrez dans la danse du MIN !

Ce matin de juillet, la «vente sur le carreau» a démarré bien avant le lever du soleil. La cadence est soutenue sous la superbe voûte de la halle de 7 000m2 du bâtiment labellisé Architecture contemporaine remarquable.

Le rythme est donné par des «chef-fes d'orchestr » : les grossistes et maraîcher-es. À tour de rôle, ils ont habillé la nef centrale de fruits, légumes, viandes ou encore bières et vins. Réglée comme du papier à musique, la vente est destinée aux professionnel-les des métiers de bouche qui viennent du mardi au samedi de 4h à 8h.

Véronique Reboud, grossiste, entreprise Grenoble Saveur et Fraîcheur

Jean-Sébastien Faure

«Tous les jours se suivent et ne se ressemblent pas ! Je suis là depuis trente ans, c'est un métier de bosseurs et de bosseuses. La vie privée s'en est mêlée puisque j'ai rencontré mon mari ici, nous travaillons ensemble maintenant. Dès que je m'installe à mon pupitre, je suis cheffe d'orchestre des commandes. Je donne le rythme : mon ton de voix est parfois militaire, c'est signe que le carnet de commandes est plein et qu'il faut y aller (rires) ! Actuellement, nous choisissons beaucoup de produits français, car c'est la bonne saison. Sinon, nous faisons aussi de l'import. Dès que je peux valoriser un producteur français, je le mets en première ligne. Nos fournisseurs ne sont pas juste des numéros : il y a un suivi des produits, une fidélité parfois historique, une relation de confiance et parfois d'amitié.»

Une vie à l'envers

Nous sommes au cœur de l'été et les couleurs accrochent le regard : tomates rouges, vertes et jaunes, poivrons verts, cerises, bouquets de salades, dégradés de nectarines et choux rouges... ainsi que l'impressionnante taille des pastèques marocaines.

L'endroit a une allure de petite cité, avec son fourmillement propre et le café-restaurant Chez Mumu, qui distille une ambiance bien vivante malgré l'horaire très matinal. «Ici, on vit à l'envers des autres», précise la tenancière.

Toute l'année, une quinzaine de grossistes et une dizaine de producteurs locaux louent un ou plusieurs box de 120m2, donnant d'un côté sur les quais de chargement et déchargement, et de l'autre sur la nef commerciale ou «carreau central». Les produits vendus ici seront ensuite distribués sur le territoire par les maraîchers, primeurs ou encore restaurateurs venus fraîchement les acheter.

Michel Guilherme, maraîcher à Tullins, spécialisée dans les salades aux goûts, noms et formes variés

Jean-Sébastien Faure

«J'avais cinq ans la première fois que je suis venu au MIN avec mon père. Je vends diverses variétés de laitues et chicorées : aucune n'a le même goût. Un produit préparé soi-même n'a pas le même goût que d'acheter tout prêt. La cuisine simple a un goût, c'est important, je défends ça. Aujourd'hui, je trouve que la maîtrise de ce qu'on mange se perd... c'est dommage. J'adore conseiller les clients car j'ai des exigences sur la qualité du produit, le goût des choses... Les marges sont courtes pour nous aujourd'hui, mais je suis toujours là.»

Pourquoi un MIN ?

Mis en place par l'État, les MIN sont de véritables «mines de produits alimentaires frais», organisant leur transaction (réception, vente et redistribution) dans une zone de consommation donnée. La volonté politique était de regrouper en un lieu unique l'offre et la demande de ces fraîches denrées, organiser leur commerce avec hygiène, dans une logique de mise en concurrence et aider à fixer les prix du marché (le mercuriel).

À Grenoble, avant le MIN, l'essentiel de cette activité était situé dans le quartier des halles Sainte-Claire. Le MIN a été construit en 1963 rue des Alliés, proche des grandes voies de circulation. Son architecte Marcel Welti faisait partie du mouvement moderne.

Sylvain Frappat
Une fresque a été réalisée cette année dans le cadre du Street Art Fest par le duo d’artistes portugais et polonais MOTS.

C'est la fête !

L'anniversaire du MIN sera célébré le 7 octobre prochain de 10h à 18h, pour «montrer au grand public la vie d'un MIN». Cette «grande fête culinaire, ludique et gratuite» prévoit six pôles d'animation sous la halle. Au programme : escape game, présence d'animaux de la Petite Ferme en balade, jeux sportifs, démonstration de cuisine avec les écoles hôtelières et des Maîtres Restaurateurs, foodtrucks, petit marché des maraîcher-es et grossistes, rencontres avec les acteurs-trices de la transition alimentaire et énergétique, etc. À cette occasion, un nouveau nom sera attribué à l'établissement !

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